Ô femme, île lointaine et nue ! Ô le mystère
De n'être rien sans toi qui de moi tout espères
Et de ne rien vouloir qu'un désir passionnel
Qui nous ferais tous deux éternels sur la terre !
Ton visage est d'eau pure où je me désaltère
Ts cheveux sont comme les blé alourdis par le soleil
Où rêvent des iris. Et j'aime, en ton sommeil
Dans l'ombre respirer ta nuque fougère...
Le jour avec la nuit dans tes yeux se mélangent
Si bien que je ne sais si c'est l'aube où le soir
De notre amour. Et je me meurs d'un bel espoir
Comme d'un ciel trop bleu les fragiles mésanges...
Dans le puits de tes yeux mon image est captive
Mais avec elle, aussi, tout l'azur vagabonde...
La feinte de tes cils au battement si long,
Sait déjouer de moi les furtives esquives...
Sous tes bras alanguis sont les pasage tendres
Où montent mes baisers ainsi que des brebis
Et tes épaules nues, aux rondeurs de pain bis,
Sont fraîches à ma bouche et chaudes comme cendres...
Cambré comme bêliers -- mais pour quelles batailles ?
Tes deux seins sont armés des roses de l'orgueil
Des portes de l'amour ils défendent le seuil
Mais, mon désir aidant, de faiblesse tréssaillant...
Ta hanche a les rebonds de ces hautes collines
Où gonflent les moissons dans la houl des vents
Ce soir j'y ceuillerai des pavots chancelants
Pour tes rêves tendres qu'il faut que je devine...
Tes bras sont comme une onde où nageraient des cygnes
D'un même mouvement ils coulent sur mes flancs
Me portant un bonheur qui va s'élargissant
Nous mêlant l'un à l'autre en un délire insigne...
Aux vagues de la mer j'emprunte mes caresses
Le sable sous leurs jeux s'allonge nuit et jour
Mais le vent inconstant, doux et fort tour à tour
Imite en vain l'amour qui jamais n'à de cesse...
Il suffit d'un regard de tes yeux plein d'étoiles
Pour que la nuit s'ilumine, certaine des dieux
Et de leur préferance, Astres mystérieux
Guidez-moi jusqu'à vous comme voguent les voiles...
Tu es sur l'horizons le matin qui s'éveille
La cime la plus haite au-dessus de la mer
L'onde sous tes pieds nus couche ses flots amers
Mon âme en tes reflets se cherche et s'émerveille...
Ô femme, île lointaine aux étés de lavande
Voici mes mains tendres dans la touffeur des thyms
Ma quête de l'Amour à travers tes chemins
Et mes chants de berger, pour toi seule, en offrande ! ...